Communiqué
d'Amnesty International
en date du 01.04.2014
La circulaire du ministre de l’Intérieur est claire : il faut éloigner davantage d’étrangers; y compris certains demandeurs d’asile avant la fin de leur procédure. Ce rappel aux préfets est conforme à la loi, mais celle-ci ne respecte ni le droit international ni le droit européen. Un problème qui met en danger plusieurs milliers de personnes chaque année.
Extrait de la circulaire du 11 mars 2014 de Manuel Valls aux préfets :
Je vous invite donc à vous assurer que des Obligations de Quitter le Territoire Français soient prises dès le refus opposé par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) en cas d'examen de la demande selon la procédure prioritaire »
La circulaire est disponible à cette adresse
Amnesty International France et l’ACAT-France avait demandé à Monsieur Valls, avant qu'il ne quitte son ministère, d’abroger cette circulaire pour quatre raisons :
1 - La loi française est défaillante et dangereuse pour les réfugiés.
La loi française autorise le renvoi de certains demandeurs d’asile dès le rejet de leur demande par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides.
Même si ces personnes demandent à la Cour nationale du droit d’asile de réviser cette décision, les préfets peuvent les renvoyer dans leur pays.
Or, sur la totalité des personnes réfugiées en France, près de la moitié le sont grâce à l’intervention de la Cour. Pourtant, la circulaire du ministre de l’Intérieur incite à mieux utiliser cette procédure accélérée et donc à renvoyer effectivement hors du territoire ces demandeurs d’asile.
En 2013, plus de 13.200 personnes étaient concernées par cette procédure accélérée.
Depuis plusieurs années, AI France et l’ACAT-France poursuive un plaidoyer inlassable pour que la France modifie sa législation et cesse de prendre le risque de renvoyer des personnes, avant la fin de leur procédure, dans des pays où elles pourraient être persécutées.
2- Une mesure à contre-courant des engagements de François Hollande
Cette consigne donnée aux préfets entre en contradiction flagrante avec les engagements pris par Françoise Hollande lorsqu’il était candidat à l’élection présidentielle. Ce dernier s’était engagé à reconnaître un recours suspensif pour tous les demandeurs d’asile.
3- Une décision contraire aux règles européennes
Le 2 février 2012, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme. Dans cette affaire, la Cour a jugé que le risque pour un demandeur d’asile d’être éloigné sans pouvoir bénéficier d’un « recours effectif » devant une juridiction, violait la Convention européenne des droits de l’homme.
Plus clairement encore, un texte européen, adopté le 23 juin 2013, indique que « les Etats membres autorisent les demandeurs à rester sur leur territoire jusqu’à l’expiration du délai prévu pour l’exercice de leur droit à un recours effectif et, si ce droit a été exercé dans le délai prévu, dans l’attente de l’issue du recours ». Cette directive relative aux procédures d’asile doit d’ailleurs être transposée par la France.
4- La réforme du droit d’asile : une occasion pour assainir la procédure d’asile
A l’occasion des débats sur le projet de loi relatif à l’asile, dont la publication est prévue d’ici quelques semaines, AI France demandera aux parlementaires de renforcer la protection des réfugiés en France en modifiant sur ce point crucial du « droit au recours effectif » la législation française.